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LETTRE OUVERTE — Des personnalités iraniennes en appellent à la FIFA

Des personnalités iraniennes en appellent à la FIFA pour exiger la levée de l’interdiction d’accéder aux stades imposée aux femmes en Iran.
Le 22 juin 2018 : Appel à la FIFA pour que l’Iran lève l’interdiction discriminatoire imposée aux femmes d’entrer dans les stades.

Nous les signataires iraniennes notons que la Fédération Internationale des Football (FIFA) a depuis trop longtemps fermé les yeux sur l’interdiction décrétée par la République islamique d’Iran de la présence des femmes dans les stades.

Cette interdiction représente une violation fondamentale des principes de base de la FIFA. L’article 4 des Statuts de la FIFA déclare que toute discrimination “est strictement interdite et punie par la suspension ou l’expulsion.

Les politiques de la FIFA – et ses déclarations antérieures contre cette interdiction – sonnent creux étant donné le refus continu de l’Iran d’en tenir compte, sans pour autant subir la moindre sanction.

Pour la première fois depuis 1980, suite à des protestations de plus en plus nombreuses à la fois au niveau national et internationale, et cela malgré la pression continuelle des forces de sécurité, les Iraniennes ont pu entrer dans le Stade Azadi à Téhéran le 20 juin pour voir le match télévisé de l’Iran contre l’Espagne dans le cadre de la Coupe du Monde. Mais il n’y a eu aucune indication pouvant laisser penser que cette interdiction est levée de façon permanente, en particulier pour des matchs en direct. L’image des femmes et des hommes debout épaule contre épaule – tranquilles et exubérants – assistant à ce match projeté sur grand écran montre à l’évidence l’absurdité des considérations justifiant cette interdiction.

Nous en appelons à la FIFA pour qu’elle tienne bon sur ses principes en considérant que l’Iran viole l’un des plus fondamentaux d’entre eux, et exige que la République islamique lève définitivement l’interdiction de la présence des femmes dans les stades.

A ceux qui pensent que cela n’est pas important pour les Iraniennes, nous leur conseillons de prendre connaissance des actions menées par de si nombreuses femmes pour entrer dans les stades en faisant semblant d’être des hommes – en portant des perruques, de fausses moustaches et des vêtements d’homme. Chaque année des femmes sont arrêtées ou expulsées des stades lorsque les forces de sécurité les identifient comme des femmes déguisées en hommes. Nous leur conseillons aussi de regarder les centaines d’Iraniennes qui sont parties en Russie pour assister à la Coupe du monde. Le football est une passion nationale en Iran. Les images des hommes et des femmes d’Iran debout épaule contre épaule en Russie – ainsi que les milliers de femmes et d’hommes d’Iran dans d’autres pays autour du monde regardant et acclamant leurs équipes nationales – ont été ‘virales’ sur les médias sociaux en Iran.

Le décalage entre le peuple d’Iran et le gouvernement iranien sur cette question est flagrant. La culture iranienne aime les célébrations, même lorsque le peuple est en proie à des tensions graves économiques et politiques, celui-ci manifeste sa joie en regardant son équipe. Alors que les Iraniens postent des commentaires sur les médias sociaux, applaudissant ces images, ravis de l’excitation des jeux et postant des expressions de joie et de bonne humeur (“Combien je voudrais être là ! Profites-en pour moi !”), leur gouvernement s’entête dans son refus renfrogné et de mauvaise humeur de respecter la volonté de ses citoyens et la demande de la communauté internationale.

Les autorités iraniennes justifient leur politique discriminatoire en prétextant que le climat grossier de stades de sport ne serait pas un endroit convenable pour les femmes. Mais cela n’a pas été un problème pour les femmes partout ailleurs dans le monde. L’Iran est le seul pays qui interdit la présence des femmes dans ses stades. Et il y a beaucoup de pays à majorité musulmane pieuse, où la religion est un pilier central de la vie, qui n’interdisent pas aux femmes l’entrée des stades – ou qui n’utilisent pas la Charia pour justifier cette politique discriminatoire.

Le droit d’une femme à assister à des événements dans des stades n’est pas le seul qui soit violé en Iran. Mais c’est la même mentalité qui empêche les Iraniennes de voyager seules ou d’avoir le même poids devant les tribunaux. En défiant ce comportement discriminatoire, on défie aussi cette mentalité dans toutes ses implications.

Quand des législateurs iraniens empêchent une femme de regarder et d’applaudir son équipe nationale, ils empêchent le droit d’une famille à célébrer cette fête ensemble. Un père et son fils peuvent regarder et célébrer l’événement, mais une mère et sa fille ne le peuvent pas. La fracture de l’unité de la famille est l’une des formes les plus anciennes du contrôle autoritaire. Son injustice profonde demeure.

En tant qu’Iraniennes, nous soutenons notre équipe nationale, mais nous n’oublions pas celles qui ne peuvent pas assister aux matches ou qui sont emprisonnées pour avoir essayé d’entrer dans des stades en Iran.

Nous saluons notre équipe et nous saluons toutes les femmes et les hommes courageux qui soutiennent l’égalité malgré des risques personnels graves. Nous demandons à la FIFA de faire preuve de la même intégrité et de soutenir ses propres principes. Nous demandons que la FIFA exige de l’Iran qu’il mette fin définitivement à l’interdiction de la présence des femmes dans ses stades de sports.

Signataires :
Shohreh Aghdashloo – Academy Award-nominated actress (House of Sand and Fog, Star Trek: Beyond)
Banafsheh Akhlaghi – Human rights lawyer, CHRI board member
Goli Ameri – Diplomat, businesswoman
Nina Ansary, Ph.D. – Historian, author, CHRI board member
Nazanin Boniadi – Actress (Homeland, Counterpart, upcoming Hotel Mumbai), activist, CHRI board member
Shirin Ebadi – Nobel Peace Laureate, human rights lawyer
Googoosh – Legendary Iranian singer
Mehrangiz Kar – Human rights lawyer, author
Shappi Khorsandi – Comedian, author
Sharon Nazarian – Academic, philanthropist
Shirin Neshat – Visual artist, film director
Gissou Nia – Human rights lawyer
Shahrnush Parsipur – Author
Nasim Pedrad – Actress, writer (Saturday Night Live, New Girl, upcoming Aladdin)
Homa Sarshar – Author, journalist
Nayereh Tohidi, Ph.D. – Professor of Gender and Women’s Studies at CSUN
Sheila Vand – Actress (Argo, A Girl Walks Home Alone at Night)
Necar Zadegan – Actress (24, Girlfriends’ Guide to Divorce)

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