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La FIFA se déculotte devant Téhéran

Rubrique REBONDS de Libération (vendredi 14 mai 2010 page 22)

Par Annie Sugier Linda Weil-Curiel, Présidente et Secrétaire de la Ligue du Droit International des Femmes (LDIF).

Début avril des dépêches de presse annoncent la décision prise par la FIFA de refuser la participation de l’équipe féminine iranienne de football aux premiers Jeux Olympiques de la Jeunesse (JOJ) qui auront lieu à Singapour en août prochain. Le Comité National Olympique iranien exigeait que les joueuses portent le hidjab en contradiction avec l’article du règlement général de la FIFA : « L’équipement de base nécessaire ne peut inclure aucun signe équivalent à une affirmation d’ordre politique religieux ou personnel ». Nous avions alors salué  cette décision de bon sens et d’indépendance, la FIFA ayant passé outre les appels pressants du Comité olympique iranien et du Comité international olympique (Libération du 28 avril).
Or voilà que moins d’un mois plus tard des dépêches de presse font état du revirement de la FIFA. L’annonce en venue d’abord de Téhéran qui a claironné triomphalement : «  La FIFA a levé une interdiction pour les joueuses iraniennes, de participer aux JOJ ». Cette reculade résulte d’une rencontre, le mois denier, à Genève, entre Joseph F. Blatter, président de la FIFA et Ali Kafashian., président de la Fédération iranienne de football (IFF). La FIFA essaie de sauver la face par des explications fumeuses : « Cette décision (de réintégrer l’équipe) a été prise après confirmation par écrit de l’IFF et du Comité national olympique iranien qu’ils acceptent une solution selon laquelle les joueuses ne porteront pas le hidjab islamique pendant les matchs de la compétition. A la place, les joueuses peuvent porter un couvre-chef sur leur chevelure mais qui ne doit pas descendre sous les oreilles ni recouvrir leur nuque ». La vérité sort de la bouche du président de l’IFF lui-même : «  nous lui avons dit (à la FIFA) que le fait de les empêcher (les iraniennes) de jouer avec le voile islamique empêchait le développement du football féminin ». Rien ne devant être laissé au hasard, la conception de ce hidjab new look est en train d’être  travaillée par des « fabricants locaux de vêtements de sport ». Il sera conseillé à ceux qui penseraient que l’abdication de la FIFA rend service au sport féminin en Iran, de revoir le documentaire consacré par la chaîne Arte à la rencontre entre footballeuses allemandes et iraniennes  qui s’est déroulée à Téhéran, en avril 2009: « le jour du match, les hommes restent aux portes du stade, journalistes allemands y compris, selon le compte rendu qu’en fit l’Equipe. Sur le terrain, ça joue hidjabs blancs des visiteuses contre hidjabs noirs des receveuses. Des femmes de tous âges investissent les lieux. En tribunes les chants se transforment en revendications ‘hommes et femmes, mêmes droits et même libertés’ ». Conclusion, malgré les accords passés, il n’y eut pas de match retour : « il fut annulé au dernier moment par les autorités iraniennes prétextant un problème technique sur l’avion… ».
Ce n’est donc pas la première fois, et ce ne sera sans doute pas la dernière, que le monde du sport se fait cocufier par le régime des mollahs. Il est loin le temps où l’Afrique du Sud était exclue des JO pour cause d’apartheid. Sport et courage seraient-ils antinomiques dès lors qu’il s’agit du droit des femmes ? Nous l’avons déjà écrit, mais il n’est pas inutile de le rappeler, ce sont les futures Nawal el-Moutawakel et Hassiba Boulmerka, qui osent résister au port du voile islamique et respecter les règles du sport, que l’on assassine.



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